Les étudiants, grands oubliés de la crise du coronavirus, victime de l’inflation et des contraintes de la crise des logements... Alors que plus de 20% vivent sous le seuil de pauvreté, ils sont isolés, anxieux et n’ont aucun moyen de vivre des études loin des difficultés. Les étudiants sont bien loin de l’idylle que leurs réservaient « leurs plus belles années ».
Qu’est ce que la précarité étudiante ? « 56% des étudiants ne mangent pas à leur faim », « un étudiant sur trois, vit dans un logement précaire ». Ces propos relayés dans les médias dénoncent une précarité étudiante grandissante. Alors que l’inflation atteint encore au mois de janvier 2023, les 6% selon l’Insee, les étudiants continuent encore de devenir de plus en plus précaires. L’observatoire de la vie étudiante annonce que le logement constitue une part importante des dépenses (57%). Il évoque également que le domaine de la santé est évité par les étudiants, une dépense ponctuelle trop chère pour certains. Il ne s’agit pas du seul domaine touché, l’alimentation l'est également. C’est le constat que font plusieurs associations telles que le secours populaire français ou encore les épiceries solidaires. Leur fréquentation est en constante hausse. De plus, 80% des étudiants travaillent en France à côté de leurs études.
En 2019, des manifestations ont eu lieu suite à l'immolation d'un étudiant dénonçant la détresse et la précarité chez les jeunes. 1 an plus tard, la crise du coronavirus les a privé, d’une part de leur liberté d'assister directement à leurs cours, d’une autre part à une stabilité économique et sociale.
Entre la difficulté à payer le loyer, à se nourrir ou encore l’angoisse de ne pas tenir jusqu’a la fin du mois, les étudiants sautent des repas, ne se chauffent plus et tentent de rester solidaires. D’autres essayent d’avoir un travail à coté de leurs études, mais là encore, le stress augmenté par les problématiques et les responsabilités que peuvent avoir certains étudiants dans leur travail, nuisent au bon déroulement de ces années qui façonneront leur vie professionnelle. Certains sont contraints de jongler entre plusieurs postes, une solution qui met en péril la viabilité des études.
«Je suis régulièrement à découvert. L’an dernier j’étais embauchée au McDo. Cette année, j’ai postulé pour un boulot de serveuse dans un bar. Un contrat de vingt heures par semaine, je vais demander à mon université une dispense d’assiduité pour pouvoir rater certains cours. », intervient une étudiante. « Je vis avec 100 euros par mois » Le 31 octobre 2022, une vidéo postée sur la plateforme Tik Tok, annonce à toute la population française, la réelle et difficle vie des étudiants les plus précaires. Maëlle, une étudiante à SciencesPo Paris montre son inquiétude face à la baisse de sa bourse, passant de 396 euros à 100 euros depuis sa rentrée en septembre 2022. Ses parents vivant à Mayotte ne disposent pas de revenus suffisants pour subvenir aux besoins de leur fille. Sa mère est fonctionnaire et son père est au chômage. Sur l’île, le salaire de sa mère bénéficie d’une compensation due à l’augmentation des prix. Cependant, cette augmentation se répercute sur la bourse de sa fille qui se voit diminuer.
La détresse des étudiants étrangers durant la crise du Covid 19 Ils sont les grands oubliés depuis la crise du coronavirus. Isolés, anxieux loin de leur famille et à bout de ressources financières, des étudiants étrangers vivent une détresse silencieuse. Parfois même, la détresse a dépassé les frontières. Alors qu’un grand nombre d’étudiants vivaient par leur petits boulots, un grand nombre de ces derniers ont fermé. Pour cause, la crise du Covid-19.
Certains, ne pouvaient espérer une aide financière de la part de leurs parents, soit par une difficulté financière également vécu, ou bien par l’impossibilité d’envoyer de l’argent, les banques de certains pays étant fermées durant la crise. De plus, ces étudiants étrangers connaissent mal leurs droits.
Ils ne savent pas à qui se référer pour demander de l’aide. Ils ne connaissent que très peu l’administration du pays dans lequel ils font leurs études.
De longues et pénibles études Une autre part d’étudiants est souvent oubliée lorsqu’on parle de précarité. C’est celle des doctorants. « les conditions de vie et de recherche des doctorants sont dramatiques » alerte la FAGE dans une enquête publiée le 20 septembre. Selon cette étude, un quart des doctorants n'arrive pas à subvenir à ses besoins et depuis dix ans, la France en aurait donc perdu 10.000. Afin de les aider, depuis quelques années, la France voit naître plusieurs épiceries solidaires, destinées aux étudiants dans le besoin. Dans de nombreuses grandes villes de France, les universités accueillent de plus en plus ces structures. Ces associations, fonctionnant par dons ou bien par des rachats à la grande distribution sont souvent réservées à des étudiants avec un « reste à vivre » inférieur à environ 150 euros par mois. «C’est un véritable soulagement. Le coût de la vie est beaucoup plus cher à Lyon que dans le reste de la région. Ça m’aide beaucoup», Clément, 21 ans.
Une réponse gouvernementale satisfaisante ? Alors que l’hexagone compte près de trois millions d’étudiants en cette rentrée 2022 et plus de 700.000 élèves boursiers, seulement 235.000 logements sociaux sont disponibles en France. Alors que le gouvernement avait annoncé un plan de construction de 60.000 logements en résidences universitaires durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, seulement 10.723 nouveaux logements ont été construit entre 2017 et 2021 nous annonce la CNOUS (Centre national des œuvres universitaires et scolaires).
Le gouvernement a annoncé, le mardi 22 novembre 2022, une enveloppe de 10 millions d’euros afin de lutter contre la précarité alimentaire des étudiants. Depuis 2022, l’inflation touche la population et les étudiants y sont plus sensible que jamais. Cette aide d’urgence soutiendra les associations qui agissent en faveur des étudiants les plus précaires. Elle devrait financer "au moins 300.000 colis alimentaires permettant à un étudiant de se nourrir pendant une semaine", affirme Le ministère de l'Enseignement supérieur dans un communiqué publié ce mardi.
L’objectif de cette manoeuvre est de « compléter l’offre alimentaire accessible aux étudiants au plus près de leurs besoins, structurer les réseaux de distribution, et couvrir plus particulièrement les sites sur lesquels l’offre de restauration est actuellement insuffisante », précise le gouvernement.
En 2023, l’Etat a annoncé vouloir la création d’un nouveau Fonds pour une aide alimentaire durable, inscrit dans le projet de loi de finances 2023 et doté de 60 M€, qui permettra de soutenir des achats de produits frais durables et sous labels de qualité pour les 4 millions de bénéficiaires de l’action des associations ; le maintien de la tarification sociale des repas aux CROUS à 1€ pour les étudiants boursiers et précaires, et à 3,30€ pour tous les autres étudiants; la hausse de 4 % des bourses sur critères sociaux à la rentrée 2022, le versement d’une aide exceptionnelle de 100€ à plus d’1,5 million d’étudiants, ainsi que la revalorisation des APL de 3,5 % et le gel des loyers dans les résidences étudiantes.
Le gouvernement tend également vers une revalorisation des bourses étudiantes. Une première forme aboutie de cette réforme pourrait voir le jour d’ici septembre prochain. Le premier volet de cette réforme pourrait conduire à revaloriser les bourses (le barème de revenus pour les calculer n'a pas été revu depuis 2013). Une seconde mesure pourrait être celle d’un revenu de base, réclamé par les organisations étudiantes depuis 2019. L'Unef et l'association étudiante L'Alternative réclamaient déjà une aide versée à tous les étudiants, d'un montant minimum de 1.102 euros, correspondant au seuil de pauvreté défini par l’Insee. « Je veux refonder le système des bourses et des APL parce qu'il y a beaucoup de jeunes qui, quand ils ne peuvent plus vivre chez leurs parents, ne sont pas aidés comme il faut », expliquait Emmanuel Macron , en avril 2022, lors de la campagne présidentielle. 40 % de jeunes qui ne vivent plus avec leurs parents « sont en dessous du seuil de pauvreté », soulignait le chef de l’Etat.
C’est donc par une promesse de campagne que se jouera le futur des étudiants.
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